11 janvier 2017
Sukkwan Island, Ugo Bienvenu (d'après le roman de David Vann)
Sukkwan Island est un roman de l'américain ayant grandi en Alaska David Vann, paru en 2010 aux éditions Gallmeister et lauréat du prix Médicis cette même année. Son adaptation en album, signée Ugo Bienvenu, est parue quant à elle aux éditions Denoël en 2014.
Jim, la quarantaine, entraîne Roy son fils de treize ans dans une aventure un peu folle : une année tous les deux dans une cabane au confort spartiate d'une petite île déserte d'Alaska. Le défi ? Survivre en auto-suffisance durant les mois d'hiver par la chasse et la pêche. Si l'expérience est tentante, elle fait rapidement déchanter Roy. Car son père, brisé par la vie et ses échecs - notamment avec les femmes - est loin d'être un modèle. Très vite, Roy étouffe sur cette petite île, coincé entre son père et cette nature violente.
Je m'étais tenue à l'écart de ce roman depuis sa sortie, craignant sa gravité d'après les critiques que j'en avais lues ou entendues (petite nature, moi ?). Je me doutais que c'était un très beau texte, mais je ne me sentais pas forcément l'âme d'aller m'enfermer en compagnie de ces deux hommes sur une île alaskienne. Mais un collègue est arrivé ce matin en me tendant cet album, visiblement ébranlé par sa lecture, ne me laissant d'autre choix que de le découvrir immédiatement...
Toutes mes impressions étaient fondées : Sukkwan Island est une adaptation majestueuse d'un roman qui doit l'être tout autant, mais qui vous heurte tel un uppercut. Je n'ai pas pu le reposer avant d'en connaître le dénouement, sous le choc du drame qui prend forme à chaque page. La tension monte progressivement dans ce huis-clos angoissant où il faut tuer, dépecer et vider des animaux pour survivre. L'ambiance est magnifiquement rendue par le dessin tout en finesse d'Ugo Bienvenu. La figure paternelle chancelante et fragile, qui broie inconsciemment son fils par ses remarques acerbes, dérange autant qu'elle suscite une forme d'empathie. L'écart se creuse entre les deux personnages, l'un perdu dans sa solitude et ses regrets, l'autre s'ouvrant tel un bourgeon à son adolescence naissante. C'est dérangeant, sombre, violent, dur, mais si bien traité. Une lecture que je ne suis pas près d'oublier et un dessin qui va me hanter, c'est certain.
Les avis de Jerome, Enna, Moka, Stephie.
C'est aujourd'hui chez Noukette !
Vos commentaires
- Je suis "petite nature" en ce moment. Pas tellement tentée par cet huis-clos à ciel ouvert
- Heu... Si je dis non, je sors ??
Comme je disais à Jerome, je crois que c'est la seule façon que j'ai eue de m'approcher de ce texte. Malgré la qualité que je pressens, je ne pense pas me plonger dans le roman de David Vann. Cette histoire est quand même si dure et marquante... (je suis vraiment petite nature...)
- Ah oui ? Moi je n'ai rien vu venir à la lecture de cet album (enfin, j'ai eu plein d'idées qui me sont venues, glauques et dérangeantes, mais pas celle qu'il fallait !
) Je ne peux pas te dire s'il faut ou non que tu lises l'adaptation en BD mais en tout cas moi j'ai aimé cette plongée rapide dans ce huis-clos étouffant.